"Le combat des Trente" fut un épisode mémorable (mais inutile) de la guerre de Succession de Bretagne en 1351. À la suite d'un défi lancé par Jean IV de Beaumanoir à Robert Bemborough, les deux camps choisirent trente champions qui s'affrontèrent dans un tournoi digne de la Table Ronde. Le combat tourna à l'avantage des partisans de Charles de Blois, mais n'eut aucun impact sur le déroulement de la guerre.
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J'ai vu récemment un documentaire sur le Béhours ce sport de combat par équipe en armure médiévale. Il a apparemment été créé en Russie et la France est très active dans ce sport. Il existe plusieurs catégories mais la catégorie reine est le 30 contre 30. Je me demande si cet épisode historique ne serait pas l'inspiration ou la justification pour cette catégorie.
fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9hourd_(sport)
Cela veut dire quoi "tournoi digne de la Table Ronde" ?
La table ronde fait partie de la légende Arthurienne mais il n'est pas tellement question de tournoi mais plutôt de dragons, de graal, de châteaux enchantés, d'anneau d'Yvain (et non divin), de siège périlleux (la chaise, pas l'état de siège) etc...
Pour la guerre de succession de Bretagne, c'est un conflit compliqué sous fondement de querelle anglo-française. C'est aussi et surtout un conflit juridique.
"Les concurrents se présentent tous deux à Paris pour recevoir l'arbitrage du roi Philippe VI. Jean de Monfort plaida le fait que depuis 1297, la Bretagne était un duché-pairie. La Bretagne se devait donc d'exercer le droit français sur son sol, ce qui permettait à Jean de Monfort d'accéder à la tête du duché. Jeanne de Penthièvre, elle, plaida sa propre cause, au nom du droit de représentation breton. La situation est donc plus que paradoxale :
- Charles de Blois, pro-français, fonde sa légitimité sur le fait qu'il est marié à la descendante la plus proche, ce qui est propre au droit breton.
- Jean de Montfort, « breton », s'appuie sur la loi salique, mise en avant par le roi de France dans son conflit avec le roi d'Angleterre et devant donc faire jurisprudence dans le royaume."
On se donne rendez-vous, on délimite la zone du duel qu'on ne doit pas quitter sous peine de déshonneur. Le combat est confu au début, puis une trouée est fait et exploité, le parti perdant se débande et se constitue prisonnier car il eut été déloyal de priver les vainqueurs de leur rançon. Les combattants se sont même mis d'accord sur une pause pour boire du vin d'Anjou !
Ces duels sont néanmoins très différents du béhourd actuel. On ne tape pas comme des bourrins pour finir en "câlin" histoire de se faire tomber par terre (ce qui rend le béhourd assez ridicule, je trouve). Le combat des 30 (en fait ils sont 32 contre 32) et autres combats médiévaux sont rapides : on cherche la faille, dès qu'elle est trouvée le combat se résout rapidement. Bemborough peut en témoigner : il finira transpercé par une lance.
Le duel n'a en effet aucun impact sur le conflit. La plupart des blésistes meurent l'année suivante. Peu ou prou la même chose pour les monforts. Lors de ce combat, 6 pro-français et 9 pro-anglais meurent (sans compter les blessés qui mourront après).
En fait, la France en mal de victoire dans ce conflit de succession se sert de cette victoire dans sa propagande. Puis en 1880, on redécouvre cette victoire et la IIIème république en soif de revanche après la guerre de 1870 va s'en servir pour mobiliser le patriotisme.
Le parti de Blois, soutenu par la France, perdra ce conflit après la bataille d'Auray. L'Angleterre s'imaginait déjà en grand vainqueur en Bretagne avec un duc à son service. La France, elle, était appauvrie par ce conflit et par le traité de Brétigny lui imposant de lourde sanction (rançon pour le roi, perte de territoire important).
C'était sans compter sur le nouveau roi de France, Charles V (1364 - 1380), qui va habilement négocier le traité de Guérande et transformer une défaite militaire en une brillante et importante victoire politique.
Il ne s'opposera pas à Jean de Monfort en tant que duc de Bretagne et officialise très habilement 2 points importants sur la suite de la guerre de 100 ans :
- Jean de Monfort rend son hommage au roi de France en décembre 1366, il fait ainsi reconnaitre la souveraineté de la France sur la Bretagne, même si dans les faits le duché est très autonome. Charles V n'est pas dupe, il sait que cet hommage n'a aucune valeur dans les faits, mais il s'attire ainsi le parti et l'amitié de la noblesse bretonne. Laquelle bascule ainsi dans le camp français et va être une grosse épine dans le pied des Anglais.
- Il rentre dans le jeu de Jean de Monfort sur la loi salique. En consolidant l'introduction de la masculinité dans le droit successoral, il délégitime d'autant plus les prétentions d'Édouard III à la couronne de France.
Les Anglais ne vont ainsi jamais pouvoir utiliser la Bretagne comme base opérationnelle, c'est le début d'une succession de défaite pour eux. Par une guerre tout azimut, Charles V va reprendre tout son royaume et même étendre les frontières du Royaume.
Tous les commentaires (10)
J'ai vu récemment un documentaire sur le Béhours ce sport de combat par équipe en armure médiévale. Il a apparemment été créé en Russie et la France est très active dans ce sport. Il existe plusieurs catégories mais la catégorie reine est le 30 contre 30. Je me demande si cet épisode historique ne serait pas l'inspiration ou la justification pour cette catégorie.
fr.wikipedia.org/wiki/B%C3%A9hourd_(sport)
Cela veut dire quoi "tournoi digne de la Table Ronde" ?
La table ronde fait partie de la légende Arthurienne mais il n'est pas tellement question de tournoi mais plutôt de dragons, de graal, de châteaux enchantés, d'anneau d'Yvain (et non divin), de siège périlleux (la chaise, pas l'état de siège) etc...
Pour la guerre de succession de Bretagne, c'est un conflit compliqué sous fondement de querelle anglo-française. C'est aussi et surtout un conflit juridique.
"Les concurrents se présentent tous deux à Paris pour recevoir l'arbitrage du roi Philippe VI. Jean de Monfort plaida le fait que depuis 1297, la Bretagne était un duché-pairie. La Bretagne se devait donc d'exercer le droit français sur son sol, ce qui permettait à Jean de Monfort d'accéder à la tête du duché. Jeanne de Penthièvre, elle, plaida sa propre cause, au nom du droit de représentation breton. La situation est donc plus que paradoxale :
- Charles de Blois, pro-français, fonde sa légitimité sur le fait qu'il est marié à la descendante la plus proche, ce qui est propre au droit breton.
- Jean de Montfort, « breton », s'appuie sur la loi salique, mise en avant par le roi de France dans son conflit avec le roi d'Angleterre et devant donc faire jurisprudence dans le royaume."
D’ailleurs ce combat est l’une des missions dans Age of Empires 4.
L’aspect épique peut être aussi. Tel que décrit on se croirait dans un récit médiéval fantastique.
Peut être enfin le fait que le tournoi eut été composé des meilleurs chevaliers et combattants de Bretagne ? Une sorte de team comme la table ronde :)
Digne d'un combat avec Perceval et Karadoc, ça devait être beau!
On se donne rendez-vous, on délimite la zone du duel qu'on ne doit pas quitter sous peine de déshonneur. Le combat est confu au début, puis une trouée est fait et exploité, le parti perdant se débande et se constitue prisonnier car il eut été déloyal de priver les vainqueurs de leur rançon. Les combattants se sont même mis d'accord sur une pause pour boire du vin d'Anjou !
Ces duels sont néanmoins très différents du béhourd actuel. On ne tape pas comme des bourrins pour finir en "câlin" histoire de se faire tomber par terre (ce qui rend le béhourd assez ridicule, je trouve). Le combat des 30 (en fait ils sont 32 contre 32) et autres combats médiévaux sont rapides : on cherche la faille, dès qu'elle est trouvée le combat se résout rapidement. Bemborough peut en témoigner : il finira transpercé par une lance.
Le duel n'a en effet aucun impact sur le conflit. La plupart des blésistes meurent l'année suivante. Peu ou prou la même chose pour les monforts. Lors de ce combat, 6 pro-français et 9 pro-anglais meurent (sans compter les blessés qui mourront après).
En fait, la France en mal de victoire dans ce conflit de succession se sert de cette victoire dans sa propagande. Puis en 1880, on redécouvre cette victoire et la IIIème république en soif de revanche après la guerre de 1870 va s'en servir pour mobiliser le patriotisme.
Le parti de Blois, soutenu par la France, perdra ce conflit après la bataille d'Auray. L'Angleterre s'imaginait déjà en grand vainqueur en Bretagne avec un duc à son service. La France, elle, était appauvrie par ce conflit et par le traité de Brétigny lui imposant de lourde sanction (rançon pour le roi, perte de territoire important).
C'était sans compter sur le nouveau roi de France, Charles V (1364 - 1380), qui va habilement négocier le traité de Guérande et transformer une défaite militaire en une brillante et importante victoire politique.
Il ne s'opposera pas à Jean de Monfort en tant que duc de Bretagne et officialise très habilement 2 points importants sur la suite de la guerre de 100 ans :
- Jean de Monfort rend son hommage au roi de France en décembre 1366, il fait ainsi reconnaitre la souveraineté de la France sur la Bretagne, même si dans les faits le duché est très autonome. Charles V n'est pas dupe, il sait que cet hommage n'a aucune valeur dans les faits, mais il s'attire ainsi le parti et l'amitié de la noblesse bretonne. Laquelle bascule ainsi dans le camp français et va être une grosse épine dans le pied des Anglais.
- Il rentre dans le jeu de Jean de Monfort sur la loi salique. En consolidant l'introduction de la masculinité dans le droit successoral, il délégitime d'autant plus les prétentions d'Édouard III à la couronne de France.
Les Anglais ne vont ainsi jamais pouvoir utiliser la Bretagne comme base opérationnelle, c'est le début d'une succession de défaite pour eux. Par une guerre tout azimut, Charles V va reprendre tout son royaume et même étendre les frontières du Royaume.
Bois ton sang Beaumanoir, la soif te passera
Il existe à Saint-Brieuc (ou existait) une rue du Combat des Trente