Sénèque essaya de ne plus être riche

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Le philosophe Sénèque, qui prôna la frugalité et la retraite, fut pourtant l'une des plus grandes fortunes de Rome. Il essaya cependant à plusieurs reprises de rendre cette fortune à Néron qui l'avait accablé de cadeaux, pressentant que l'inconstant empereur en prendrait ombrage tôt ou tard.

En 65 fut éventée la conjuration de Pison, une tentative d'assassinat de Néron ourdie par un sénateur. L'affranchi d'un de ses complices dénonça le complot et les conjurés furent condamnés au suicide.
Sénèque tomba avec eux quoiqu'il n'eût rien à voir dans l'affaire. Il resta fidèle à sa philosophie stoïcienne et "sut mourir" : son suicide fut long et douloureux, mais le philosophe resta digne et droit.


Commentaires préférés (3)

Le philosophe, accusé d’avoir participé à une conjuration contre l’empereur Néron, a reçu l’ordre de se suicider. Il accepte la sentence et sa femme choisit de mourir avec lui. Les époux s’ouvrent les veines, mais la mort tarde à venir.

Sénèque demande alors aux servantes d’éloigner sa femme pour éviter que l’un ne faiblisse à la vue des souffrances de l’autre. Pauline survivra, épargnée par l’empereur. Un médecin entaille les chevilles du philosophe pour que le sang coule plus vite et un esclave lui présente du poison. Au second plan, un centurion dépêché par Néron veille à l’exécution de la sentence. Sur la droite, un disciple note les dernières paroles du philosophe stoïcien, qui donne, par son trépas, l’exemple des plus hautes vertus morales face à la tyrannie.

Attention tout de même aux termes car la philosophie stoïcienne est bien plus complexe que ne laisse présager l’expression courante aujourd’hui : être stoïque.

Il ne sagit pas simplement d’être « droit » ou « digne ». Pour se faire une idée on peut lire les 10 principes de Marc Aurèle qui constituent une base simplifiée de la pensée stoïcienne.

Ce qui me fait penser à la mort de Socrate :
« Criton fit un signe à l’esclave qui se tenait tout à côté. L’esclave sortit et mit un certain temps avant de revenir, suivi de celui qui devait donner le poison et qui l’apportait tout broyé dans une coupe.
Quand il vit l’homme, Socrate lui dit : « Très bien, mon ami, c’est toi qui t’y connais, que faut-il faire ? – Rien d’autre, répondit-il, qu’aller et venir après avoir bu jusqu’à ce que tu sentes une lourdeur dans les jambes ; à ce moment, allonge-toi : de cette façon, cela fera son effet. » En même temps, il lui tendit la coupe. Socrate la prit. […]
Il porta la coupe à ses lèvres et tout tranquillement, tout facilement, il la vida. Jusqu’à ce moment, nous avions, pour la plupart, réussi à nous retenir de pleurer ; mais quand nous vîmes qu’il buvait, et qu’il avait bu : impossible ! Ce fut plus fort que moi, je laissai moi aussi couler mes larmes, à tel point que je dus me couvrir le visage pour pleurer sur moi-même – car ce n’était pas sur lui, mais sur mon propre sort que je pleurais, en comprenant quel ami j’allais perdre. […]
L’homme nous montrait que Socrate se refroidissait et devenait raide. Déjà presque toute la région du bas-ventre était froide ; découvrant son visage (car il se l’était couvert), Socrate dit – et ce furent là les derniers mots qu’il prononça : « Criton, nous devons un coq à Esculape. Payez cette dette, ne soyez pas négligents.
Bien sûr, fit Criton, ce sera fait. Mais vois si tu n’as rien d’autre à nous dire ? »
A cette question. Socrate ne répondit plus rien ; au bout d’un petit moment, il eut un soubresaut. L'homme lui découvrit le visage : Socrate avait le regard fixe. Voyant cela, Criton lui ferma la bouche et les yeux.
Voilà, Echécrate, ce que fut la fin de notre ami, d’un homme dont nous pouvons dire que, parmi tous ceux qu’il nous a été donné de connaître, il fut le meilleur, le plus sensé aussi et le plus juste ».
Platon, Phédon, 117b (Flammarion, Ed. Luc Brisson), pp.1239-1240.


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Le philosophe, accusé d’avoir participé à une conjuration contre l’empereur Néron, a reçu l’ordre de se suicider. Il accepte la sentence et sa femme choisit de mourir avec lui. Les époux s’ouvrent les veines, mais la mort tarde à venir.

Sénèque demande alors aux servantes d’éloigner sa femme pour éviter que l’un ne faiblisse à la vue des souffrances de l’autre. Pauline survivra, épargnée par l’empereur. Un médecin entaille les chevilles du philosophe pour que le sang coule plus vite et un esclave lui présente du poison. Au second plan, un centurion dépêché par Néron veille à l’exécution de la sentence. Sur la droite, un disciple note les dernières paroles du philosophe stoïcien, qui donne, par son trépas, l’exemple des plus hautes vertus morales face à la tyrannie.

Attention tout de même aux termes car la philosophie stoïcienne est bien plus complexe que ne laisse présager l’expression courante aujourd’hui : être stoïque.

Il ne sagit pas simplement d’être « droit » ou « digne ». Pour se faire une idée on peut lire les 10 principes de Marc Aurèle qui constituent une base simplifiée de la pensée stoïcienne.

Ce qui me fait penser à la mort de Socrate :
« Criton fit un signe à l’esclave qui se tenait tout à côté. L’esclave sortit et mit un certain temps avant de revenir, suivi de celui qui devait donner le poison et qui l’apportait tout broyé dans une coupe.
Quand il vit l’homme, Socrate lui dit : « Très bien, mon ami, c’est toi qui t’y connais, que faut-il faire ? – Rien d’autre, répondit-il, qu’aller et venir après avoir bu jusqu’à ce que tu sentes une lourdeur dans les jambes ; à ce moment, allonge-toi : de cette façon, cela fera son effet. » En même temps, il lui tendit la coupe. Socrate la prit. […]
Il porta la coupe à ses lèvres et tout tranquillement, tout facilement, il la vida. Jusqu’à ce moment, nous avions, pour la plupart, réussi à nous retenir de pleurer ; mais quand nous vîmes qu’il buvait, et qu’il avait bu : impossible ! Ce fut plus fort que moi, je laissai moi aussi couler mes larmes, à tel point que je dus me couvrir le visage pour pleurer sur moi-même – car ce n’était pas sur lui, mais sur mon propre sort que je pleurais, en comprenant quel ami j’allais perdre. […]
L’homme nous montrait que Socrate se refroidissait et devenait raide. Déjà presque toute la région du bas-ventre était froide ; découvrant son visage (car il se l’était couvert), Socrate dit – et ce furent là les derniers mots qu’il prononça : « Criton, nous devons un coq à Esculape. Payez cette dette, ne soyez pas négligents.
Bien sûr, fit Criton, ce sera fait. Mais vois si tu n’as rien d’autre à nous dire ? »
A cette question. Socrate ne répondit plus rien ; au bout d’un petit moment, il eut un soubresaut. L'homme lui découvrit le visage : Socrate avait le regard fixe. Voyant cela, Criton lui ferma la bouche et les yeux.
Voilà, Echécrate, ce que fut la fin de notre ami, d’un homme dont nous pouvons dire que, parmi tous ceux qu’il nous a été donné de connaître, il fut le meilleur, le plus sensé aussi et le plus juste ».
Platon, Phédon, 117b (Flammarion, Ed. Luc Brisson), pp.1239-1240.

a écrit : Attention tout de même aux termes car la philosophie stoïcienne est bien plus complexe que ne laisse présager l’expression courante aujourd’hui : être stoïque.

Il ne sagit pas simplement d’être « droit » ou « digne ». Pour se faire une idée on peut lire les 10 principes de Marc Aurèle qui constituent un
e base simplifiée de la pensée stoïcienne. Afficher tout
Ou même les Lettres à Lucilius de Sénèque justement, que je lis en ce moment : il n'expose pas les principes en un traité, mais il s'applique à former son ami, procureur de Sicile.
Ce qui est amusant est qu'ils ont comme petite tradition que Sénèque termine chaque lettre par une citation qu'il commente, et de manière assez surprenante, il cite systématiquement Epicure, qui n'est pas stoïcien et ferait même figure de chef de l'école opposée. Il s'en explique cependant dans la lettre 30 (je crois), et je n'ai pas encore lu les suivantes alors je ne sais pas s'il continue à le citer.

a écrit : Ou même les Lettres à Lucilius de Sénèque justement, que je lis en ce moment : il n'expose pas les principes en un traité, mais il s'applique à former son ami, procureur de Sicile.
Ce qui est amusant est qu'ils ont comme petite tradition que Sénèque termine chaque lettre par une citation qu'il
commente, et de manière assez surprenante, il cite systématiquement Epicure, qui n'est pas stoïcien et ferait même figure de chef de l'école opposée. Il s'en explique cependant dans la lettre 30 (je crois), et je n'ai pas encore lu les suivantes alors je ne sais pas s'il continue à le citer. Afficher tout
En disant que Epicure serait de l'école opposée aux stoïciens, tu sembles prêter du crédit à l'interprétation courante mais infondée qui ferait d'Epicure un bon vivant voire même un jouisseur invétéré menant une vie d'abus et de frasques. Au contraire il pronait la mesure et la sobriété en toutes choses et montrait l'exemple en menant une vie simple et frugale. Et donc, même s'il y avait des divergences entre l'épicurisme et le stoïcisme, c'est une vision simpliste et fausse de croire que c'étaient des doctrines opposées. La recherche du plaisir c'est l'hédonisme, à ne pas confondre avec l'épicurisme !

a écrit : En disant que Epicure serait de l'école opposée aux stoïciens, tu sembles prêter du crédit à l'interprétation courante mais infondée qui ferait d'Epicure un bon vivant voire même un jouisseur invétéré menant une vie d'abus et de frasques. Au contraire il pronait la mesure et la sobriété en toutes choses et montrait l'exemple en menant une vie simple et frugale. Et donc, même s'il y avait des divergences entre l'épicurisme et le stoïcisme, c'est une vision simpliste et fausse de croire que c'étaient des doctrines opposées. La recherche du plaisir c'est l'hédonisme, à ne pas confondre avec l'épicurisme ! Afficher tout Je semble peut-être le dire, mais je ne le dis pas du tout !
D'abord, c'est un fait, Épicure c'est l'épicurisme, une école différente du stoïcisme. Peut-être pas l'opposée, mais une autre école.
D'autre part, si on se donne la peine, comme je le fais actuellement (c'est de lire les lettres de Sénèques qui m'a donné envie de m'intéresser à sa vie et m'a fourni la matière de l'anecdote), de lire ce dont on parle, on verra justement que Sénèque dit exactement qu'il puise les maximes qu'il commente, toujours pour les trouver très sages, chez celui qu'il considère pourtant comme le maître d'une autre école, à savoir Épicure. Il dit toujours qu'il se sert chez l'adversaire, ou des formules approchantes.
Je ne comprends pas pourquoi on vient me parler des clichés sur l'épicurisme, que je n'ai pas mentionnés, ni relayés ! Lisez Sénèque puis, ensuite, apportez la contradiction à ce que je ne livre que comme ma propre expérience de lecteur, rien de plus...

a écrit : Ou même les Lettres à Lucilius de Sénèque justement, que je lis en ce moment : il n'expose pas les principes en un traité, mais il s'applique à former son ami, procureur de Sicile.
Ce qui est amusant est qu'ils ont comme petite tradition que Sénèque termine chaque lettre par une citation qu'il
commente, et de manière assez surprenante, il cite systématiquement Epicure, qui n'est pas stoïcien et ferait même figure de chef de l'école opposée. Il s'en explique cependant dans la lettre 30 (je crois), et je n'ai pas encore lu les suivantes alors je ne sais pas s'il continue à le citer. Afficher tout
Je ne sais pas si tu as cru cela mais en tout cas je ne critiquais pas du tout l’anecdote que je trouve très intéressante.

J’apportais juste une précision sur certaines expressions courantes qui sont bien éloignées des courants de pensée dont elles sont issues.

Si tu as d’autre anecdotes en stock grâce à tes lectures, n’hésite surtout pas.

a écrit : Je vous renvoie à cette vidéo de Front Populaire où il apparait que de nombreux philosophes sont des riches professant aux pauvres de se passe de richesse...

www.youtube.com/watch?v=lI4V9k3Y5dQ
C’est notamment pour cela que j’apprécie et admire profondément Alexandre Jollien : un philosophe handicapé, en prise directe avec les difficultés de la vie et le réel.

a écrit : Je ne sais pas si tu as cru cela mais en tout cas je ne critiquais pas du tout l’anecdote que je trouve très intéressante.

J’apportais juste une précision sur certaines expressions courantes qui sont bien éloignées des courants de pensée dont elles sont issues.

Si tu as d’autre anecdotes
en stock grâce à tes lectures, n’hésite surtout pas. Afficher tout
Je répondais seulement au commentaire précédent, mais sans aucune animosité, enfin j'espère que mon commentaire n'en affiche aucune, contre aucun des autres commentaires d'ailleurs !
L'écrit paraît souvent plus sec ou plus agressif que ne le serait le même propos, tenu à l'oral, mais je serais désolé que quelqu'un se sente rabroué ou renvoyé dans les cordes.
Je vais chercher quelques formules exactes de Sénèque quand il cite Épicure et je vous les recopie.
Dans la fameuse lettre 30, ou à peu près (je n'ai pas mon bouquin sous la main), il en parle, parce que Lucilius lui a demandé pourquoi il citait toujours Epicure. En substance, il lui répond que la doctrine stoïcienne se prête mal à des résumés, se transmet mal par maximes, car c'est tout un art de vivre, et que s'accrocher à la seule citation, un peu comme à un gris-gris, c'est ne pas investir réellement la philosophie de vie (on peut le dire ici sans galvaudé le terme) qu'il défend ; que, d'autre part, les maîtres du stoïcisme, Zénon, Cléanthe et d'autres, ont surtout prêché par l'exemple, pas par la maxime ou l'apophtegme.
Bref, c'est un philosophe que je trouve touchant, simple à comprendre, et sincère, et sa vie le montre assez, bien que j'ai choisi pour l'anecdote la contradiction flagrante qui semble invalider tout ça.
Bon, d'autre part, je n'en fais pas un saint, il a aussi aidé à l'assassinat d'Agrippine, laquelle n'était pas non plus toute blanche.

a écrit : Je ne sais pas si tu as cru cela mais en tout cas je ne critiquais pas du tout l’anecdote que je trouve très intéressante.

J’apportais juste une précision sur certaines expressions courantes qui sont bien éloignées des courants de pensée dont elles sont issues.

Si tu as d’autre anecdotes
en stock grâce à tes lectures, n’hésite surtout pas. Afficher tout
J'ajoute, TybsXckZ, qu'en tant que vieux membre de SCMB, je t'ai beaucoup lu et je sais que tu débats toujours dans le respect de tes interlocuteurs et depuis des positions modérées et documentées. Voilà, c'était le petit coup de brosse à reluire... mais c'est sincère. :)

a écrit : Attention tout de même aux termes car la philosophie stoïcienne est bien plus complexe que ne laisse présager l’expression courante aujourd’hui : être stoïque.

Il ne sagit pas simplement d’être « droit » ou « digne ». Pour se faire une idée on peut lire les 10 principes de Marc Aurèle qui constituent un
e base simplifiée de la pensée stoïcienne. Afficher tout
« Ne pas se réjouir d’un gain, ne pas déplorer une perte » (Tanguy)

Lettre 2 : "Voici mon butin d'aujourd'hui : c'est chez Épicure que je l'ai trouvé, car j'aime aussi à passer dans le camp d'autrui. Comme transfuge ? Non pas ; comme éclaireur."
Lettre 4 : "je t'envoie la pensée qui a aujourd'hui mon suffrage. Celle-ci encore, j'ai été la cueillir dans le jardinet d'un voisin."
Lettre 7 : "Il faut finir et, comme j'en ai institué l'usage, payer quelque chose pour cette lettre. Je ne l'emprunterai pas à mon propre fonds : nous en sommes toujours à mettre au pillage Épicure. [...] Tu me demanderas peut-être pourquoi je fais tant de belles citations d'Épicure plutôt que de nos auteurs. Mais pourquoi toi-même regarderais-tu ces pensées comme propriété d'Épicure, non du public ?"
Lettre 12 : "《Le mot, dis-tu, est d'Épicure. Qu'as-tu à faire de ce qui n'est pas chez nous ? 》Tout ce qui est vérité est ma vérité. Je ne cesserai pas de t'administrer de l'Épicure, afin que les gens, qui jurent sur la parole du maître et considèrent non ce qui est dit, mais qui l'a dit, sachent que les excellentes choses sont la parole de tous."
Lettre 13 : "À cette maxime, je ne joindrais pas le nom de son auteur, si elle n'était un peu à part des autres, ne figurant pas, dans les recueils, avec les dits d'Épicure que j'ai pris sur moi de vanter et d'adopter."
Lettre 14 : "《L'auteur ! 》, me dis-tu. Sache combien j'ai l'humeur libérale : je suis résolu à faire valoir les trouvailles d'autrui. C'est d'Épicure, de Métrodore, de tel autre de la même équipe. Au demeurant, qu'importe qui l'a dit ? c'est pour tout le monde qu'on l'a dit."
Lettre 16 : "Ma lettre à peine ouverte, tu vas, si je te connais bien, la parcourir de l'œil, à la recherche du petit cadeau qu'elle doit t'apporter. Fouille, et tu trouveras. Ne t'émerveille pas de ma munificence : c'est encore du bien d'autrui que je suis libéral. Mais pourquoi dire : le bien d'autrui ? Toute belle pensée, d'où qu'elle vienne, est mon bien, voire même cette réflexion d'Épicure"

De la même eau, on peut citer les lettres 21 ("si je rappelle plus volontiers les paroles de choix d'Épicure, c'est à l'intention de ces gens qui recourent à lui poussés d'une malsaine espérance, qui pensent se donner un voile pour couvrir leurs vices"), 22, 23, 29.

Dans les lettres 31 et 32, il ne cite personne. Et voici quelques extraits de la 33 (celle que je numérotais 30 dans mes précédents commentaires) : "Tu désires que je continue d'insérer des sentences dans mes lettres, en les empruntant à nos maîtres stoïciens. Ce n'étaient pas des collectionneurs de fleurettes." "Ne fais donc pas honneur à Épicure de celles que je t'ai adressées ; elles sont à tout le monde et principalement à notre école. Mais, chez lui, elles se signalent davantage parce qu'elles apparaissent à de plus larges intervalles et parce qu'elles sont inattendues, parce qu'une forte parole surprend chez un homme qui fait profession de mollesse ; c'est du moins le jugement le plus répandu." "N'exige donc pas de maximes détachées, de pensées recueillies de-ci de-là : le stoïcisme présente comme un tout continu ce qui ailleurs n'est donné qu'en extraits. Le colifichet tapageur est un article que nous ne tenons pas ; nous n'abusons pas l'acheteur" "Ainsi donc, dépose l'espoir de goûter en l'effleurant le génie des grands hommes [...] Chaque trait de l'œuvre de génie est un des filaments qui composent la trame et qui la soutiennent ; rien ne s'en peut retrancher : autrement, tout croule."

a écrit : Lettre 2 : "Voici mon butin d'aujourd'hui : c'est chez Épicure que je l'ai trouvé, car j'aime aussi à passer dans le camp d'autrui. Comme transfuge ? Non pas ; comme éclaireur."
Lettre 4 : "je t'envoie la pensée qui a aujourd'hui mon suffrage. Celle-ci encore
, j'ai été la cueillir dans le jardinet d'un voisin."
Lettre 7 : "Il faut finir et, comme j'en ai institué l'usage, payer quelque chose pour cette lettre. Je ne l'emprunterai pas à mon propre fonds : nous en sommes toujours à mettre au pillage Épicure. [...] Tu me demanderas peut-être pourquoi je fais tant de belles citations d'Épicure plutôt que de nos auteurs. Mais pourquoi toi-même regarderais-tu ces pensées comme propriété d'Épicure, non du public ?"
Lettre 12 : "《Le mot, dis-tu, est d'Épicure. Qu'as-tu à faire de ce qui n'est pas chez nous ? 》Tout ce qui est vérité est ma vérité. Je ne cesserai pas de t'administrer de l'Épicure, afin que les gens, qui jurent sur la parole du maître et considèrent non ce qui est dit, mais qui l'a dit, sachent que les excellentes choses sont la parole de tous."
Lettre 13 : "À cette maxime, je ne joindrais pas le nom de son auteur, si elle n'était un peu à part des autres, ne figurant pas, dans les recueils, avec les dits d'Épicure que j'ai pris sur moi de vanter et d'adopter."
Lettre 14 : "《L'auteur ! 》, me dis-tu. Sache combien j'ai l'humeur libérale : je suis résolu à faire valoir les trouvailles d'autrui. C'est d'Épicure, de Métrodore, de tel autre de la même équipe. Au demeurant, qu'importe qui l'a dit ? c'est pour tout le monde qu'on l'a dit."
Lettre 16 : "Ma lettre à peine ouverte, tu vas, si je te connais bien, la parcourir de l'œil, à la recherche du petit cadeau qu'elle doit t'apporter. Fouille, et tu trouveras. Ne t'émerveille pas de ma munificence : c'est encore du bien d'autrui que je suis libéral. Mais pourquoi dire : le bien d'autrui ? Toute belle pensée, d'où qu'elle vienne, est mon bien, voire même cette réflexion d'Épicure"

De la même eau, on peut citer les lettres 21 ("si je rappelle plus volontiers les paroles de choix d'Épicure, c'est à l'intention de ces gens qui recourent à lui poussés d'une malsaine espérance, qui pensent se donner un voile pour couvrir leurs vices"), 22, 23, 29.

Dans les lettres 31 et 32, il ne cite personne. Et voici quelques extraits de la 33 (celle que je numérotais 30 dans mes précédents commentaires) : "Tu désires que je continue d'insérer des sentences dans mes lettres, en les empruntant à nos maîtres stoïciens. Ce n'étaient pas des collectionneurs de fleurettes." "Ne fais donc pas honneur à Épicure de celles que je t'ai adressées ; elles sont à tout le monde et principalement à notre école. Mais, chez lui, elles se signalent davantage parce qu'elles apparaissent à de plus larges intervalles et parce qu'elles sont inattendues, parce qu'une forte parole surprend chez un homme qui fait profession de mollesse ; c'est du moins le jugement le plus répandu." "N'exige donc pas de maximes détachées, de pensées recueillies de-ci de-là : le stoïcisme présente comme un tout continu ce qui ailleurs n'est donné qu'en extraits. Le colifichet tapageur est un article que nous ne tenons pas ; nous n'abusons pas l'acheteur" "Ainsi donc, dépose l'espoir de goûter en l'effleurant le génie des grands hommes [...] Chaque trait de l'œuvre de génie est un des filaments qui composent la trame et qui la soutiennent ; rien ne s'en peut retrancher : autrement, tout croule."
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Franchement, j'aimerais bien avoir un phrasé pareil oralement...
(Et oui il parle beaucoup de lui, ça frôle l'obsession )

a écrit : Franchement, j'aimerais bien avoir un phrasé pareil oralement...
(Et oui il parle beaucoup de lui, ça frôle l'obsession )
La traduction est très élégante, je trouve aussi, mais aussi très libre, un peu à l'ancienne. (Elle date, je pense, des années 50 ; on se permettait encore, à cette époque, de privilégier la beauté de la traduction à l'exactitude ; on parle de "belle infidèle".)
Ensuite, Sénèque ne parle pas tellement de lui dans ses lettres, les citations que j'ai relevées donnent cette impression car c'est justement le moment où il explique son choix d'auteur. L'essentiel de ses lettres est vraiment consacré à la formation de Lucilius.

a écrit : Attention tout de même aux termes car la philosophie stoïcienne est bien plus complexe que ne laisse présager l’expression courante aujourd’hui : être stoïque.

Il ne sagit pas simplement d’être « droit » ou « digne ». Pour se faire une idée on peut lire les 10 principes de Marc Aurèle qui constituent un
e base simplifiée de la pensée stoïcienne. Afficher tout
Ou Epictète, le maître en la matière, dont Marc Aurèle était un disciple